Réagissez : la polémique virginité/mariage

Publié le par Buffalo (de l'Equipe de Débattons !)

Voici un article tiré de Libération...





Elisabeth Badinter parle de «honte», le PS dénonce un jugement «atterrant» qui «bafoue le droit des femmes». Patrick Devedjian (UMP) évoque une décision «inacceptable» qui «revient à intégrer la pratique de la répudiation dans le droit positif». Et son parti demande à la Chancellerie de déclencher «un recours» :l’annulation d’un mariage par le tribunal de Lille, parce que l’épouse avait menti sur sa virginité, provoque un vif débat. Dans ce concert de protestations qui unit féministes, associations antiracistes, gauche et droite, une voix reste isolée. Celle de Rachida Dati. «Le fait d’annuler un mariage est aussi un moyen de protéger la personne qui souhaite peut-être se défaire du mariage, parce que je pense que cette jeune fille […] a souhaité également, sans doute, se séparer assez rapidement», a commenté la Garde des sceaux.

Les raisons d’une annulation

X. et Y., musulmans, se marient à l’été 2006. La cérémonie s’achève très mal. Lors de la nuit de noces, l’homme découvre que son épouse n’est pas vierge comme il le croyait et comme elle le lui avait assuré. Dès le lendemain, il entame des démarches pour faire annuler le mariage. Devant la juge, Y. reconnaît qu’elle a menti et acquiesce à la demande de nullité.

La juge s’est appuyée sur l’article 180 du Code civil et a considéré que ce mariage avait été conclu «sous l’emprise d’une erreur objective», et qu’une telle erreur était «déterminante dans le consentement». Y. «a été présentée comme célibataire et chaste», relève le jugement. Il n’en était rien. Le tribunal donne raison au mari qui a considéré que sa «vie matrimoniale a commencé par un mensonge, lequel est contraire à la confiance réciproque entre époux». Le mari a été trompé sur la virginité de sa femme, considérée en l’occurrence (et non de manière absolue pour tous les candidats au mariage) comme «une qualité essentielle.»

Pourquoi ne pas avoir divorcé?

L’annulation du mariage permet d’en effacer les traces, alors qu’un divorcé le restera toujours. L’union n’a pas eu lieu. L’affront est gommé. Le marié retrouve une virginité. «Comme s’il n’y avait jamais rien eu» a-t-il expliqué à son avocat.

Recours ou pas recours?

Beaucoup réclament que la décision du tribunal soit contestée…sur le terrain du droit. Frédéric Lefèbvre, porte-parole de l’UMP et proche de Nicolas Sarkozy, demande «un recours dans l’intérêt de la loi pour dire le droit». Le procureur ne semble pas sur cette voie. Il a parlé d’une décision «assez conforme à la jurisprudence classique», et insisté sur le fait que les deux époux étaient «d’accord». Tout comme Rachida Dati, qui a défendu la décision lilloise mais n’a toutefois pas voulu préciser si elle était favorable ou non à un appel. Un «pourvoi dans l’intérêt de la loi» auprès de la Cour de cassation peut être envisagé une fois le délai d’appel d’un mois expiré.

Une décision discriminatoire?

Les féministes montent au créneau sur ce terrain. De fait, on ne pourra jamais prouver la virginité d’un homme.

Quelles conséquences?

Cette décision pourra-t-elle faire pression sur les candidates au mariage dans des milieux où on prône la chasteté avant le mariage? «Faisons attention à ce que cette jurisprudence va engendrer : demain il va y avoir une multiplication des nullités du mariage, on pourra avoir des jeunes filles qui pourraient subir des opérations chirurgicales pour se refaire l’hymen [lire page 4]», s’alarme Jean-Paul Delevoye, médiateur de la République. Faut-il changer la loi ? Pour Laurence Rossignol, secrétaire nationale aux droits des femmes du PS, c’est «urgent, avant que [cette décision] ne serve de point d’appui pour enfermer encore davantage les jeunes filles et les femmes.» Tout comme, Dominique Paillé porte-parole de l’UMP : «S’il y a eu stricte application de la loi, c’est que la loi n’est plus bonne, il faut la modifier.»Valérie Boyer, députée UMP, suggère «une loi visant à exclure la non-virginité comme cause déterminante du consentement».

Un jugement contraire à la laïcité?

Le jugement de Lille ne mentionne pas la religion des deux parties. Il se prononce de manière technique, pas sur des valeurs. Mais cette décision a été vue comme une atteinte à la laïcité. «A partir du moment où on rentre dans une appréciation relative en fonction des convictions religieuses, c’est un non-respect de la laïcité», a jugé le médiateur de la République. L’association Ni Putes ni Soumises s’est alarmée: «Nous marchons à grand pas vers une sacralisation du communautarisme par la justice, un glissement vers l’institutionnalisation du relativisme culturel!» Fadela Amara, secrétaire d’Etat à la Ville, parle de «fatwa». «J’ai cru que l’on parlait d’un verdict rendu à Kandahar [fief taliban en Afghanistan, ndlr].»

La mariée libérée?

En pleine polémique, certains décèlent une bonne nouvelle. «Par cette décision, cette jeune femme est libérée de devoir supporter toute sa vie un abruti étriqué d’esprit. Que ce cas fasse jurisprudence ne peut que servir les femmes» écrit un internaute de Libération.fr qui se présente «d’origine maghrébine». Une autre ajoute : «Ayant été dans le même cas (sauf que mon ex-mari savait avant notre mariage que je n’étais pas vierge, mais il ne l’a jamais digéré) je pense que c’est un bon débarras pour cette dame.» Rachida Dati semble elle aussi de cet avis.



Notes et sources :


http://www.liberation.fr/actualite/societe/329149.FR.php

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J
Il ne faut pas confondre une annulation de mariage prononcée pour des raisosn tout à fait fondamentales AUX YEUX DE LA SOCIETE (ordre public) avec un divorce prononcé à la demande de l'une des parties, pour des raisons d'ordre privé ... Ce jugement doit impérativement être cassé, à charge pour les deux époux de demander le divorce par consentement mutuel ... (puisque la femme est, semble-t-il, d'accord).La virginité ne peut pas être une qualité essentielle ... L'impuissance ou la démence peuvent en être ...
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